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— ambiance urbaine tendue, — silhouette policiĂšre, — flux d’argent / Ă©conomie parallĂšle, — tonalitĂ© grave mais pas sensationnaliste, — style presse sĂ©rieuse.  Titre : Narcotrafic : la mobilisation gĂ©nĂ©rale qui oublie l’essentiel Sous-titre : Quand la France dĂ©clare une guerre imaginaire Ă  une Ă©conomie bien rĂ©elle

Chronique de fin d’annĂ©e politique — UneAutreVie.org

La France a déclaré la guerre au narcotrafic. Encore.

Le Premier ministre SĂ©bastien Lecornu a promis une “mobilisation gĂ©nĂ©rale”, dans un discours calibrĂ© pour marquer une rupture.
Ton grave, posture martiale, vocabulaire empruntĂ© Ă  la lutte antiterroriste : on aligne les rĂ©fĂ©rences lourdes quand on ne sait plus vraiment comment s’y prendre.

Le Parlement a suivi. Presque unanimement.
Un détail : cela fait 30 ans que la France annonce une nouvelle doctrine contre les trafics.
À ce stade, ce n’est plus une doctrine : c’est une tradition de fin d’annĂ©e.

1. Un discours qui claque, qui rassure
 et qui simplifie tout

Lecornu ne fait pas semblant :

sanctions renforcées,

peines alignĂ©es sur l’antiterrorisme,

saisies accélérées des biens criminels,

coopération européenne renforcée,

approches Ă©ducatives “massives”,

réponses sanitaires modernisées.

Une panoplie complĂšte — comme si l’on pouvait rĂ©gler un marchĂ© mondial Ă  coup de lois nationales.

Le Premier ministre présente le narcotrafic comme une menace existentielle :

“Une bataille pour la RĂ©publique.”

Le mot est beau. Le problùme, c’est ce qu’il cache.

2. La France ne mÚne pas une guerre. Elle gÚre une économie parallÚle

La politique française considÚre les trafiquants comme une armée.
Erreur stratĂ©gique : ce n’est pas une armĂ©e, mais un marchĂ©, structurĂ© comme n’importe quelle filiĂšre industrielle.

Logistique internationale

Comptabilité optimisée

Gestion du risque trĂšs rationnelle

Recrutement local permanent

Flux financiers camouflés dans une économie grise mondialisée

La France traite un business comme un affrontement militaire — et s’étonne ensuite de perdre du terrain.

3. Le coĂ»t social : 7,7 milliards par an. Le coĂ»t politique : une rhĂ©torique sĂ»re d’elle-mĂȘme

Le gouvernement rappelle que les drogues coĂ»tent 7,7 milliards d’euros par an Ă  la sociĂ©tĂ©.
C’est vrai.
Mais le coĂ»t des politiques inefficaces, lui, n’est jamais comptabilisĂ©.

Chaque année, la France :

saisit beaucoup,

communique énormément,

condamne dur,

et laisse intact
 le marché.

Tu peux enfermer un dealer.
Tu ne peux pas enfermer une demande.

4. Le point aveugle : la finance criminelle

Le cƓur du trafic n’est pas dans les quartiers populaires.
Il est dans :

les circuits bancaires permissifs,

les plateformes de transfert,

les sociétés-écrans,

les investissements immobiliers opaques,

le cash recyclĂ© dans la restauration, l’évĂ©nementiel, les transports.

Tant que l’État ne met pas la mĂȘme Ă©nergie Ă  suivre l’argent qu’à surveiller les halls d’immeubles, le trafic continuera de prospĂ©rer.

Et pour l’instant, suive l’argent est ce que l’on fait
 quand il reste du temps aprùs le plan com’.

5. L’éternel oubli : la prĂ©vention, la santĂ©, les territoires

Tout le monde le sait :
Les seules politiques efficaces de réduction du trafic combinent :

prévention massive,

prise en charge sanitaire digne de ce nom,

économie locale revitalisée,

éducation renforcée,

travail social de terrain.

Mais cela coûte cher, ne se voit pas rapidement, et ne donne pas une belle phrase dans les JT de 20h.

Alors on préfÚre :
→ renforcer la rĂ©pression,
→ espĂ©rer que le marchĂ© se fatiguerait.

Le marchĂ© n’est pas fatiguĂ©.
Il explose.

6. Conclusion : une mobilisation gĂ©nĂ©rale
 pour dire qu’on fait quelque chose

Lecornu veut inscrire ce moment comme une rupture historique.
Le risque, c’est exactement l’inverse :
qu’il devienne un Ă©pisode de plus dans la sĂ©rie des grands discours sĂ©curitaires français,
sans stratégie structurelle, sans suivi financier, sans logique économique.

Les trafiquants s’adaptent.
Les consommateurs s’adaptent.
Les rĂ©seaux s’adaptent.

La seule chose qui ne s’adapte pas, c’est la politique publique.

La France mÚne une guerre imaginaire contre un ennemi qui, lui, vit dans le réel.

 

🇬🇧 EPISODE 3 — Narcotrafficking: A “General Mobilisation” That Misses the Point

End-of-year political chronicle — UneAutreVie.org

France has declared war on narcotrafficking. Again.

Prime Minister Sébastien Lecornu delivered a speech meant to sound like a turning point:
a “general mobilisation”, a rhetorical escalation, a tone borrowed from the fight against terrorism.
Heavy vocabulary is often used when lighter truths need to be hidden.

Parliament followed, almost unanimously.
A familiar scene.

France has announced a “new doctrine” against drug trafficking so many times over the past 30 years that the doctrine is no longer a strategy — it’s a seasonal ritual.

1. A speech that hits hard, reassures
 and oversimplifies everything

Lecornu didn’t hold back:

  • tougher sentences,
  • penalties aligned with anti-terror laws,
  • accelerated seizures of criminal assets,
  • reinforced European cooperation,
  • expanded educational programmes,
  • updated health responses.

A complete package — as if a global market could be dismantled with national legislation alone.

The Prime Minister frames narcotrafficking as an existential threat:

“A battle for the Republic.”

The phrase is bold. The reality it conceals is less flattering.

2. France is not fighting a war. It is managing a parallel economy

French policy imagines narcotraffickers as a hostile army.
A strategic mistake: this is not an army. It is an industry — a market with suppliers, logisticians, accountants, recruiters, and investors.

The drug economy operates with:

  • international logistics networks,
  • rational risk management,
  • constant local recruitment,
  • sophisticated financial laundering,
  • globalised cash flows.

France treats an economic sector as a battlefield — and then wonders why it keeps losing ground.

3. The social cost: €7.7 billion a year. The political cost: an overconfident narrative

The government highlights the €7.7 billion annual social cost of drugs.
True.
But the cost of ineffective policies is never part of the calculation.

Every year, France:

  • seizes more,
  • communicates more,
  • prosecutes more,
  • and leaves untouched
 the market itself.

You can imprison a dealer.
You cannot imprison demand.

4. The blind spot: criminal finance

The heart of narcotrafficking is not in the stairwells of social housing.
It is in:

  • permissive banking channels,
  • transfer platforms,
  • shell companies,
  • opaque real-estate investments,
  • cash recycled in restaurants, events, logistics.

Until the State puts as much energy into following the money as it does into policing neighbourhoods, the market will remain intact.

And for now, tracing the money is what happens
 if there is time left after the press conference.

5. The eternal omission: prevention, health, and local investment

Everyone knows the only strategies that work combine:

  • large-scale prevention,
  • strong health and addiction services,
  • real economic alternatives in deprived areas,
  • reinforced education,
  • long-term social work.

But these require money, patience, and years of investment — three things politics rarely affords.

So France defaults to:
→ more repression,
→ hoping the market will get tired.

The market is not tired.
It is booming.

6. Conclusion: a “general mobilisation”
 mostly to show something is being done

Lecornu wants this moment to be remembered as a turning point.
The risk is the opposite:
that it becomes just another episode in the long series of grandiose, ineffective French security announcements.

Traffickers adapt.
Consumers adapt.
Networks adapt.

The only thing that doesn’t adapt is public policy.

France is waging an imaginary war against an enemy that lives firmly in the real world.